Pour tous ceux qui ont déjà suivi les aventures pédalantes de frangins pas iconoclastes pour deux sous, et pour les autres, nous allons aujourd'hui[1], vous emmener dans les nuages !
Non pas dans ces brumes trop grises qui pleurent le long des vitres, non, mais plutôt vers ces nuages blancs en forme de choux-fleurs ou de coussins douillets. Ceux qui font sourire et donnent envie de s'allonger dans la ouate des rêves.
A nous deux, mon frangin et moi, dans notre destin commun, la vie nous a attribué des cases mémoires assez développées. Alors nous avons voulu partager, découvrir, commémorer et transmettre en famille notre admiration pour nos grands pères combattants de la guerre de 14.
Dans les couleurs renaissantes du printemps nous avons pris un grand plaisir à rassembler pendant quelques jours, nos enfants et petits enfants sous les encouragements de notre mamie de 91 ans.
Notre petite troupe s'est regroupée vers le secteur du « chemin des dames », dans l'Aisne, sur les terres labourées d'obus pendant les quatre années du conflit qui avait embrasé le monde.
Les archives très précises que nous avons retrouvées ont permis de situer exactement, jours après jours, le passé du grand père mobilisé à 18 ans. Le papa de mamie Simone.
C'est à lui, à eux, que notre présence témoigne d'une forme de fierté pour le respect de leur sacrifice.
Nous pensons même que eux, maintenant disparus, auraient apprécié de nous voir rassemblés en famille, heureux de se retrouver. Nous visons la fin de semaine du 1er mai.
Un gîte pouvant recevoir notre petit bataillon joyeux nous attend. Chacun arrive avec toute l'intendance pour tenir les quelques jours. Le rassemblement est entamé à partir de 16 heures.
A chaque arrivée, les victuailles s'entassent sur l'étagère et les denrées périssables sont enfournées dans le frigo.
Chacun y va de sa préparation maison, qui une tourte, qui un pain de poisson. Pour ma part, je me suis lancé pour la première fois dans la confection du célèbre pâté de lapin à mémère.
La troupe est complète à 19h 30.
La répartition des chambres et des couchages se fait dans un gentil désordre digne d'une joyeuse colonie de vacances.
L'ambiance est à la mesure de la météo : magnifique[2].
Installation, information sur l'itinéraire de la retraite de pépère, sans oublier la jeune génération.
Au casse croûte je fais la présentation du thème et du programme où, comme le veut la tradition familiale, tout est proposé rien n'est imposé.
Les jeunes s'intéressent beaucoup à la découverte du passé familial et nous sommes assaillis de questions. . . . historiques.
La tenue vestimentaire du grand père qui était dans les Zouaves est au centre des débats. La chronologie des événements de la guerre est à remettre en ordre dans les têtes. . .[3].
Demain matin, chacun va profiter du séjour, à sa façon. Rencontrer, voir, et toucher les endroits où le grand-père à sacrifié sa jeunesse.
Sequences casse croûte.
Alors à vélo ou a pied[4], nous emprunterons la piste cyclable qui relie Monampteuil aux ruines de l’abbaye de Vauclair[5].C'est la « Voie Verte de l'Ailette », portion de la future Véloroute Nationale 30 qui reliera un jour Abbeville à Dijon.
Un bon petit déjeuner avant d'y aller.
Sans grande difficulté la voie nous permet de longer le lac artificiel de Monampteuil, le canal[6] et le lac de l'Ailette[7] sur 18 km. On y circule en famille. Auriane, 6 ans en parcours un bon tiers, Arthur 5 ans frise les 5 kilomètres.
La balade à vélo sur la voie verte pour tous les âges.
Comme toujours, en France le panneautage est « améliorable ». On trouve des indications excessivement nombreuses à certains endroits et en revanche, on cherchera notre route à un croisement à trois accès qui se présente à nous vierge de flèches. Un pile ou face et une exploration de 200 mètres nous permet de retrouver le chemin qui part serpenter dans la forêt de Vauclair[8].
Au terme de la route on débouche sur les ruines de L’Abbaye de Vauclair. Sur les panneaux d'information on y apprend que les obus de l’artillerie française lui ont donné le coup de grâce lors de la bataille en 1917. Ce qui veut dire qu'en septembre 1914 quand pépère y était, il l'a vu debout, c'est impressionnant, pour nous, d'être dans ces lieux.
La nature maintenant à repris ses droits. La terre boueuse à laissé place à une herbe rasée de près, c'est presque un décor de cinéma.
Emotion !
Côté vélo, de retour vers le gîte, nous avions oublié qu'il se situe en haut de la côte de Monampteuil. Petit braquet de rigueur, et patience.
Les ruines de l'abbaye de Vauclair.
Après une bonne douche et en fin de casse croûte, je propose de rester dans l'ambiance rétro et allant visiter le musée départemental de l'école publique de Chevregny. Je crains que l'assemblée m'oppose une certaine réticence. Que nenni, on y va ! Nous allons revivre l'école telle qu'elle était au début du siècle avec porte plume, encrier, page d'écriture, tableau noir, grande cartes géographique, morale du jour et distribution de bons points. Super !
Les jeunes ont aimé cette ambiance d'un autre temps en s'échinant à tracer, à la plume les mots en pleins et déliés. Les yeux écarquillés, ils vont d'étonnement en étonnement[9].
Leçon de calcul mental, comment ils faisaient sans calculette ?
Leçons de morale : la vertu du travail, le sens de l'épargne, le respect du pain . . .
L'attention est maximum à l'école.
Les pages d'écriture. C'est pas de la tarte !
En fin de journée, un peu comme un pèlerinage, nous ne manquons pas d'aller faire quelques pas sur le pont enjambant le canal de l'Oise à l'Aisne entre Chaillevois et Chavignon. Bien que l'édifice témoigne d'une construction plus récente, nul doute que l'endroit a vu passer le régiment du grand père en Août 14 lors de la retraite[10] depuis Charleroi jusqu'au nord de Provins.
En Aout 14 Pépère tutoie le Chemin Des Dames qu'il retrouvera un mois plus tard[11].
Moment intense, frissons garantis.
On immortalise l'instant !
A la veillée, séance de visionnage des photos des archives familiales. Tout pour nous faire chaud au cœur. Clichés émouvants, heureux, toujours amusants, de souvenirs éparpillés mais présents à jamais.
Vive la famille !
Le lendemain le temps est venu de fouler les traces historiques du chemin des dames, de découvrir les vestiges des tranchées et surtout d'admirer le courage de tous les soldats du conflit.
Jean Marie me glisse une remarque dans l'oreille.
« Entre deux guerres on se demande toujours pourquoi on les fait ».
Vaste question.
Sur la route du chemin des dames[12], marquée de bordures bleues, notre troupe fait halte sur le site de la « caverne du dragon » qui est devenu un musée commémorant la bataille du chemin des dames et en particulier la journée du 16 avril 1917[13]. Il se trouve sur la terrasse du site la seconde version de la sculpture « ils n'ont pas choisi leur sépulture »[14].
Notre séjour se termine par une micro balade sur le plateau de Craonne dans la nature colorée, du vert des arbres, du jaune des colzas. D'un regard sur la plaine, on frémis rétrospectivement en pensant aux risques réels que les laboureurs prennent chaque année à retourner la terre où se cachent encore quelques désagréables surprises sous la forme d'obus non explosés[15].
Un dernier clin d'oeil au drapeau, bleu du ciel, blanc des nuages et rouge du sang que les gars ont laissé et sera venu enfin le temps de reprendre les chemins de nos vies personnelles.
Toutes les bonnes choses ont une fin comme dit le proverbe.
Oui c'était une bonne idée de se retrouver dans notre bulle de patrimoine familial.
Nous en revenons heureux de nos retrouvailles, d'une génération à l'autre. Et si, par hasard, nos anciens pouvaient nous apercevoir du haut de leur nuage, et bien, nul doute que leur yeux scintilleraient d'étoiles.
Vive eux, vive nous, et notre petite régiment de bonheur
Denis et Jean Marie Champeau 1er mai 2017.
Photos souvenirs.
Annexes
[1] Et non pas : « au jour d'aujourd'hui », ce nouveau tic de phraséologie moderne qui a le don de nous hérisser les oreilles. En effet ce triple pléonasme est aussi débile dans son usage que de dire « ce jour, au jour de maintenant ».
L'enseignement de la langue française étant parti en capilotade et les bandeaux déroulants des chaînes de télévision d'information en continu étant devenus les références linguistiques, il semble nécessaire de faire une petite mise au point.
" hui" qui signifiait « en ce jour », comme le latin "hodie” dont il provient, a été intégré dans la langue française approximativement au XVIe siècle. De nos jours, "hui" a disparu du français et le mot « au jour d’hui » a perdu son caractère pléonastique.
[2] Si vous avez suivi nos précédentes escapades de mémoire, il semble que cette fois encore, une bonne étoile veille sur nous. Encore quelques jours avant, les pétulantes présentatrices de prévisions météorologiques promettaient des hallebardes pour la période de notre séjour, mais ce dernier jour d'avril, nous gratifie d'un soleil éclatant.
[3] Une fois encore, l'enseignement de l'histoire . . .
[4] Voitures balais fournies par l'organisation. . .
[5]L’Abbaye de Vauclair
Fondée en 1134 par un groupe de moines cisterciens, l’abbaye de Vauclair se situe au coeur de la forêt. En 1914, elle conserve encore de beaux restes, mais les obus de l’artillerie française lui donnent le coup de grâce en 1917. Laissé à l’abandon, le site est redécouvert dans les années 60. Grâce au travail d’une poignée de passionnés, ce sont aujourd’hui près de 80 000 visiteurs qui se promènent chaque année parmi les ruines romantiques et mystérieuses de l’abbaye.
Sur la D886, à quelques km du carrefour de la ferme d’Hurtebise.
[6] Le canal de l’Oise à l’Aisne
Creusé de main d’homme de 1879 à 1889, détruit puis reconstruit après la Première Guerre mondiale, le canal de l’Oise à l’Aisne est un ouvrage de 48 km destiné à joindre les vallées de l’Oise et de l’Aisne. Le lac artificiel de Monampteuil, utilisé comme base de loisirs, lui sert de réservoir secondaire. Au niveau du plateau du tristement célèbre « Chemin des Dames », le canal emprunte un tunnel souterrain très profond.
[7]Le lac de l’Ailette
Créé en 1985 par le barrage des vallées de la Bièvre et de l’Ailette, le Lac de l’Ailette est une étendue d’eau artificielle de 140 ha.
[8]La forêt domaniale de Vauclair
La forêt domaniale de Vauclair a été bombardée lors de la bataille du Chemin des Dames, elle perdit bon nombre de ses arbres. Aujourd’hui, elle a retrouvé toute sa beauté et vitalité : elle regroupe plus de 1 000 ha d’espèces de feuillus et de résineux (chênes, hêtres, pins), dont la plupart ont plus de 30 ans. En cherchant sur ses multiples sentiers balisés, on peut trouver le « chêne Cuif », miraculeusement préservé, lui qui fut planté sous Louis XIV. Nous, on ne l'a pas trouvé !
[9]Blouses grises, rangs bien ordonnés, une discipline très stricte règne dans l'école du village. Souvent une même classe regroupe tous les niveaux du cours préparatoire au cours moyen. Le maître d'école enseigne français, arithmétique, science, gymnastique, éducation ménagère et morale.
On est loin des jérémiades actuelles réclamant des « moyens » (comprenez rallonge), et diminution des effectifs de classe.
[10] En bon ordre bien sûr. Les marches se déroulaient de nuit. Attention aux bruits de gamelle !
Dans le chapitre « la retraite » de l'historique du 4me régiment de zouaves_1914-1918 on retrouve les endroits où pépère est passé au mois d'Aout :
« La journée a été dure pour le régiment. . . .
Cependant notre offensive du 29 et du 30 (Aout) a fait du mal à l'ennemi, a ralenti sa marche et masqué le repli de l'armée.
Nos sections de mitrailleuses ont tiré chacune plus de 8.000 cartouches en une seule journée et nos hommes qui ont saisi l'ennemi à la gorge savent maintenant qu'on peut lui en imposer. Mais ce n'est pas l'heure choisie par le haut commandement. Lentement, en bon ordre, on se dirige vers Renansart.
Puis le lendemain 31 août on s'oriente vers Laon par Nouvion, Catillon, Pont-à-Bucy, Remies, Vivaise et Besny. Arrivé à Besny vers 18 heures on en repart à 22 heures en pleine nuit.
Par Cerny, Mons-en-Laonnois, Bourguignon, Chaillevois, Chavignon, Chavonne on atteint l'Aisne, d'un passage difficile, d'autant que le régiment est chargé de la protection de l'artillerie et que les avant-gardes nous talonnent de près. »
[11] Dans la même publication (historique du 4me régiment de zouaves_1914-1918), au chapitre « l'offensive » cette fois, pépère reviens. Les Zouaves vont y stabiliser le front en septembre puis fin octobre partiront vers la Belgique, thème de notre périple les « Flandres » :
« L'ennemi a atteint les crêtes du Chemin des Dames et entend s'y maintenir.
Nous avons de notre côté la prétention d'y prendre pied. La bataille s'engage, elle est dure. Le 14 (septembre) au soir la Division se trouve en flèche par rapport aux autres éléments de l'armée. Il faut attendre. Le 15, l'ennemi affirme sa résolution d'arrêt par un violent tir d'artillerie. Le 16 notre mouvement continue. Tandis que la 36° Division se porte sur Craonne, la 1° Compagnie du 4° Zouaves avance sur Ailles, le 11° Bataillon va aider les Anglais à Cerny et le Commandant Daugan reçoit l'ordre d'attaquer Vauclair avec son Bataillon, la 9° Compagnie et des éléments du 12° d'infanterie.
La lutte se stabilise autour de la ferme d'Hurtebise, auprès de laquelle des canons sont amenés à bras. Lutte terrible : nous attaquons et nous sommes attaqués. L'ennemi garde Vauclerc, mais ne peut engager un pouce de terrain.Cette première défense d'Hurtebise, qui se prolonge jusqu'au 17 au soir met nos fantassins à rude épreuve.
L'arrêt
(18 septembre — 28 octobre)
La mission confiée au 4° Zouaves a été glorieusement remplie. Bien qu'il n'ait pu déboucher à Hurtebise, ni se maintenir à Ailles, une ligne solide s'organise sur les crêtes Nord de la Vallée Foulon, où nous abordons le Chemin des Dames.
On commence à parler de secteur de bataillon. De Paissy à Vassogne, des tranchées de soutien sont creusées. Les hommes font l'apprentissage de ces travaux de terrassement, qui vont désormais sillonner nos plaines et les marquer comme d'une blessure, de la Mer du Nord à l'Alsace.
On passe les nuits à manier le pic et la pelle et tandis qu'une ligne de tirailleurs tient les hauteurs avancées, des compagnies stationnent en soutien dans les creutes ou se creusent, dans la vallée, des abris individuels.
On connaît maintenant les jours de garde et l'heure des relèves. Il y a des périodes de repos dans les villages de Jumigny, Moulins, Pargnan; mais quel repos! Le bombardement n'est guère moins intense que sur la ligne des tranchées. De nuit et de jour, même en dormant ou en jouant aux cartes, on attend l'obus de surprise et il y a des morts. Les distributions, qu'on fait à Troyon, Vassogne,
restent difficiles. L'ennemi devine nos habitudes et harcèle nos convois. Malgré son tir on circule et l'on travaille.
Ainsi passe cette fin de septembre.
Octobre nous trouve dans la même situation.
. . .
Tout en travaillant à la protection et à la défense, personne n'envisage encore la stabilisation définitive.
Le 12 octobre une offensive générale est tentée. Notre progression dépend du mouvement des ailes; elle ne peut avoir lieu. L'essai n'aboutit qu'à provoquer un redoublement du tir d'artillerie.
Ces jours monotones et tristes d'octobre sont marqués cependant par une détente de trois jours à Révillon. On a aussi appris à compter avec un ennemi terrible: la boue.
Les hommes savent maintenant l'énergie qu'il faut déployer dans la lutte contre la pluie, qui envahit les tranchées, les transforme en cloaques, en ruisseaux, en marécages glacés. L'arrivée des effets de drap, en permettant de remplacer la tenue de toile en guenilles a bien apporté quelque confort, mais les larges culottes rouges, qui s'alourdissent d'eau et de vase, restent peu pratiques.
Sans doute la longue marche de la retraite et de l'offensive laisse des souvenirs pénibles, des fatigues non réparées, mais la stagnation paraît encore plus dure, et c'est avec joie que le 26 on apprend qu'il est question de partir. »
Ensuite, le 4° Zouaves va prendre part à la bataille des Flandres. Enlevé le 26 du Chemin des Dames, il débarque le 29 octobre en Belgique à Furnes.
[12] Le Chemin des Dames est une route de crête située entre les vallées de l’Ailette, au nord, et de l’Aisne, au sud, qu’il surplombe. Par extension, le Chemin des Dames désigne le vaste plateau s’étendant entre ces deux vallées.
L’histoire raconte que le Chemin des Dames doit son nom aux « Dames de France », Victoire et Adélaïde, filles de Louis XV, qui depuis Paris seraient venues à la rencontre de leur gouvernante. On avait donc aménagé un chemin praticable sur une ligne de crête, entre la vallée de l’Ailette et de l’Aisne.
L’histoire débute le 26 août 1776, lorsque Françoise de Chalus, duchesse de Narbonne-Lara, achète le château de la Bove (ou Bôve, selon la date d’édition des cartes). Ce château domine le village de Bouconville-Vauclair et la vallée de l’Ailette. Cette acquisition consacre l’ascension sociale de cette auvergnate de petite noblesse.
A l'âge de quinze ans, Françoise de Chalus devient demoiselle d'honneur de la fille aînée de Louis XV, Marie-Louise-Elisabeth de France, la future Madame-Infante. Françoise de Chalus épouse, le 13 juillet 1749, le comte de Narbonne-Lara, de seize ans son aîné.
De cette union vont naître deux fils : Philippe, duc de Narbonne-Lara (né le 28 décembre 1750 à Parme) et Louis-Marie, comte de Narbonne-Lara (né le 23 août 1755 à Parme), le futur ministre de la Guerre de Louis XVI de 1791 à 1792.
Séparée de son mari, elle entre, en 1761, au service de Marie-Adélaïde de France, la quatrième fille de Louis XV, devenant Tune des quatorze dames pour accompagner le roi. Elle passe également pour avoir été la maîtresse de Louis XV et, son fils Louis-Marie, pour un bâtard royal : la ressemblance avec le roi est si forte qu:on le surnomme « demi-Louis ».
En 1780, Madame de Narbonne atteint le sommet de l'échelon social en devenant dame d'honneur et reçoit le titre de duchesse.
Cependant, le château de la Bove se trouve à l'écart des grands axes. Situé sur une crête, il ne dispose pour accès que d'un mauvais chemin sinueux, d'une largeur ne dépassant pas neuf pieds, permettant de rejoindre Taxe Soissons-Paris.
Mesdames Marie-Adélaïde de France et Sophie de France (la sixième fille de Louis XV), sont propriétaires du château de Louvois dans la Marne (à soixante kilomètres au sud-ouest de château de la Bove).
La duchesse de Narbonne-Lara arguant que Mesdames pourraient lors de leurs déplacements faire de « fréquents voyages » au château de la Bove, celui-ci, se doit donc de disposer d'une route carrossable élargie à trente pieds sur près de quatre lieues pour rejoindre l'actuelle nationale 2.
A cette époque, les travaux des routes sont soumis au régime de la corvée royale : de six à trente jours par an pour les corvéables, souvent des ruraux non rémunérés, recrutés dans un rayon de quatre lieues. La construction de cette route représente quatre à six années de travail (soit 32 400 journées de corvées pour 600 corvéables des douze paroisses alentours). Des demandes sont envoyées à Le Pelletier, l'intendant de Soissons. Celui-ci renvoie une réponse polie, car il ne voit en cette route qu'un « chemin de traverse ». Néanmoins, sans doute à cause de l'insistance de Madame de Narbonne, les travaux commencent à l'été 1784 pour s'achever à Tété 1788.
Aujourd'hui, les chercheurs affirment que Mesdames Adélaïde et Victoire ne firent qu'un unique séjour au château de la Bove en septembre-octobre 1784.
Cette route inhabituelle, sur un itinéraire très secondaire et les corvées qu'elle a nécessitées marquèrent durablement les esprits locaux. Les gens parleront longtemps de la « route des Dames ».
[13]L'offensive du 16 avril 1917
La date du 16 avril est devenue le symbole des offensives inutiles. Cette bataille est vécue comme un échec pour l'armée française. Alors que cette bataille devait être décisive, elle se solde par de lourdes pertes pour des gains sensibles mais insuffisants.
Le plan prévoit une concentration maximale de forces sur 30 km de front. Le terrain doit être préparé par un bombardement d'artillerie massif chargé de détruire les premières lignes allemandes. Ensuite, les troupes d'infanterie doivent s'élancer protégées par un feu roulant d'artillerie.
Ce plan ne tient pas assez compte du terrain qui est très défavorable : les troupes françaises se situant en contrebas et devant se lancer à l'assaut de pentes fortifiées. D'autre part, le bombardement sur 30 kilomètres de front ne peut être aussi dense que lorsqu'il s'agit de prendre un fort.
Selon le député Jean Ybarnégaray : « La bataille a été livrée à 6 heures, à 7 heures, elle est perdue ». Un peu partout sur le front, les hommes se rendent compte que l'avancée n'est pas aussi rapide que prévu. En effet le terrain est très favorable aux défenseurs : situation en surplomb, réseau de souterrains desservant carrières souterraines (les creutes) et abris bétonnés, alors que les assaillants ne peuvent pas se protéger, doivent grimper une pente souvent raide, progressant sur un sol très instable. Les pertes sont considérables parmi les troupes qui faisaient partie de la première vague d'assaut.
. . .
En fin de journée, les gains de terrain sont minimes : Les pertes en revanche sont considérables. Selon J.F. Jagielski12, les pertes s'élèvent à 134 000 hommes dont 30 000 tués pour la semaine du 16 au 25 avril.
source :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_du_Chemin_des_Dames
La journée du 16 avril 1917 a marqué tellement les esprits qu'une chanson a été écrite:
La chanson de Craonne
Pour l'occasion, le village de Craonne gagne une syllabe (Craonne se prononce habituellement krɑn, la chanson dit krɑɔn/ pour avoir le compte de syllabes). Le plateau dont il est question est le plateau de Californie qui surplombe le village. En effet l'endroit est le lieu de terribles combats à partir du 16 avril 1917 : la 1re division d'infanterie qui monte à l'assaut se trouve bloquée au niveau des caves de Craonne.
Plusieurs variantes de la chanson sont attestées.
Les paroles les plus connues sont celles publiées par Raymond Lefebvre en 1919 puis par Paul Vaillant-Couturier, lui-même issu d'une famille d'artistes lyriques parisiens, en 1934, avec de légères différences : celle de 1919 est parue dans La Guerre des soldats et celle de 1934 dans le journal Commune.
L'écrivain anarchiste Henry Poulaille, soldat sur le Chemin des Dames, publie, en 1937, une variante dans Pain de soldat : 1914-1917.
Paroles diffusées par Raymond Lefebvre | Paroles diffusées par Henry Poulaille |
Quand au bout d'huit jours le r'pos terminé C'est malheureux d'voir sur les grands boulevards | Quand au bout d'huit jours le repos terminé |
[14] Sur le plateau de Craonne avait été inaugurée en 1998 la sculpture « ils n'ont pas choisi leur sépulture » à l'occasion de la commémoration du 80° anniversaire de l'armistice de 1918.
La sculpture a été volée en 2014 et c'est une seconde version qui est installée en 2017 à la caverne du dragon. Sur le plateau de Craonne ne se trouvent que quelques éléments retrouvés des précédents vandalismes scellés dans uns stèle.
On peut penser ce qu'on veut de l'esthétique de la sculpture, l'important c'est ce qu'elle veut représenter, c'est à dire la perpétuation de mémoire des combattants qui ont péri. Pour cela les voleurs ont commis, à mon sens, une abomination digne de la plus grande sévérité. Y quand même des cons sur terre. Qu'ils soient maudits !
Mais, bon. Il se trouvera des gens pour leur trouver des excuses.
[15] Chaque année, des centaines de milliers d'obus et autres munitions sont encore mis au jour, par hasard, lors des labours ou de travaux, et le seront longtemps encore (durant 700 ans environ au rythme actuel de déminage, selon la Sécurité civile).
Le périmètre de la zone rouge a été fortement révisé dans les 5 ans qui ont suivi l'armistice, parfois à la hausse, et parfois à la baisse et sur des critères qui ont varié selon les régions.
Pour l’œil averti, un premier indice de pollution est l'abondance de billes de plomb (parfois en cours de délitement). Ces billes ont été projetées par les obus shrapnels dans les sols ou à leur surface. S'y ajoute la présence relictuelle de millions de balles. . .
Ailleurs, le couvert forestier s’est facilement reconstitué, les racines pénétrant facilement les sols disloqués et retournés par les obus, après un stade pionnier de germination des messicoles (bleuet, coquelicot, matricaire). Dans les zones agricoles ouvertes (prairies, bocage) la diversité en plantes, insectes, animaux et champignons semble anormalement basse.
. . .
Les Plans directeurs départementaux indiquent les zones susceptibles d'être reboisées (teinte verte), celles pouvant être remise en état de culture par les moyens ordinaires et par des moyens mécaniques puissants (teinte bistre) et enfin la zone à conserver comme vestiges de guerre (teinte jaune). Des rapports de la Conservation des Forêts et de la Direction des Services agricoles détaillent et justifient ces projets.
Source:
https://fr.wikipedia.org/wiki/Zone_rouge_(s%C3%A9quelles_de_guerre)